L’effet Goldblum : l’acteur qui suscite toujours une fascination aussi intense que troublante

Qui ne se souvient pas de la fameuse scène de Jurassic Park montrant l’acteur torse nu, nonchalamment étendu sur une table après avoir survécu à l’attaque du tyrannosaure? Ce glorieux moment mille fois parodié et imité en ligne est devenu un classique de la culture pop. Il a même propulsé Jeff Goldblum au rang de sexe-symbole. Quelque 27 ans plus tard, l’acteur suscite toujours une fascination aussi intense que troublante.

Jeffrey Goldblum – ou Jeff Goldblum pour le commun des mortels – a été révélé au grand écran dans The Fly, en 1986. Dans ce film de science-fiction horrifique (très drôle à revoir, en 2020) de David Cronenberg, Goldblum incarne un scientifique excentrique qui se transforme lentement, mais sûrement, en mouche particulièrement répugnante. Rien pour éveiller les passions, et pourtant la table était mise pour faire de Goldblum un sexe-symbole étrange et amusant.

Je l’avoue candidement, je ne suis pas insensible aux charmes de l’acteur américain de 68 ans. Et je ne suis pas seule. Nous sommes légion à sourire comme des idiotes lorsqu’il apparaît à l’écran, sans pouvoir réellement en expliquer la cause. Après tout, il n’a pas tout à fait la gueule et le casting d’un Brad Pitt, d’un Leonardo DiCaprio ou d’un Idris Elba... Ma collègue Dominique trouve même qu’il a un petit quelque chose de l’animateur Jean- Luc Mongrain, un homme fort divertissant, soit, mais dont le nom ne sort pas spontanément lorsqu’on tente de faire la liste des plus beaux hommes du Québec. Pourtant, le sortilège Goldblum semble bien réel!

Est-ce son regard curieux, les yeux légèrement plissés comme pour sonder le fond de notre âme? Ses lèvres pulpeuses? Ses mains de pianiste de jazz? Son look de dandy décontracté, aussi élégant en col roulé griffé qu’en chest et pantalon de cuir un peu kitch? «Oui, évidemment, sa pose lascive dans Jurassic Park est sexy, mais c’est surtout son sens de l’humour qui rend Goldblum si attirant», m’écrit mon amie Marie-Pierre. Sans surprise, c’est cette même pose qui a été immortalisée devant le Tower Bridge de Londres, sous la forme d’une statue géante de plus de 7 m à l’effigie de la vedette, pour marquer le 25e anniversaire du film culte, en 2018. On tient certainement là quelque chose: l’acteur sait séduire par l’humour qui suinte de sa présence à l’écran, comme la sueur de son torse grafigné par un dinosaure (ai-je vraiment écrit ça?).

L’excentricité de Jeff Goldblum est d’autant plus charmante qu’elle ne sacrifie rien à son accessibilité. Certes, l’acteur est reconnu comme une icône de la mode intello (ses montures de lunettes font régulièrement l’objet d’articles élogieux), mais il n’en semble pas moins affable et facile d’approche.

Le roi de l’autodérision

Au royaume des vedettes hollywoodiennes, rares sont celles qui savent autant rire d’elles-mêmes que Jeff Goldblum. En effet, l’acteur ne semble jamais rater une occasion de se foutre de sa gueule et d’en rajouter une couche. De ses participations à Saturday Night Live au sketch du Late Show with Stephen Colbert dans lequel il offre ses services pour aider les citoyens à remplir leur déclaration de revenus, en passant par les nombreuses vidéos où il répond aux questions les plus populaires (et les plus absurdes) le concernant, Jeff Goldblum se moque constamment de... Jeff Goldblum. De son phrasé si particulier («Life, uh, finds a way...») qui fait qu’on le reconnaît aussitôt, même lorsqu’il double des personnages de films d’animation, ses erreurs capillaires et vestimentaires des années 90, ses goûts de geek, ses trois mariages, etc. Il faut aussi absolument voir son rap battle contre James Corden: l’acteur pleure de rire devant les attaques sournoises et hilarantes de l’humoriste-animateur, et je ne peux m’empêcher de l’en trouver encore plus adorable.

Plus récemment, Internet a failli exploser quand il a publié une photo de lui recréant sa pose mythique, chemise ouverte et torse huilé, comme il se doit (et oui, il est toujours aussi hot!). Une façon pour le moins originale de remercier les fans américains qui avaient suivi ses conseils et s’étaient inscrits en vue de voter pour les élections présidentielles de cet automne! Car oui, Goldblum est aussi ouvertement politisé – c’est un fervent démocrate –, et il a régulièrement profité de sa tribune pour enjoindre à Donald Trump de laisser la présidence aux personnes compétentes.

«Je l’ai toujours trouvé séduisant, mais il l’est encore plus en vieillissant. Ses cheveux de “silverfox” bien peignés, son look étudié, ses petites manies un peu précieuses: on dirait qu’il s’est détaché de son image d’homme viril pour adopter un style moins genré, plus unisexe. Il s’amuse avec son apparence, et je trouve ça vraiment sexy, un homme qui n’a pas peur d’oser s’affranchir des stéréotypes», me confie mon amie Laora. Marie-Pierre confirme: «Quand on le regarde, on se dit qu’on a fait du chemin depuis John Wayne et l’image de l’acteur ténébreux et taciturne.»

Acteur chouchou de réalisateurs d’envergure (Robert Altman, Wes Anderson, Steven Spielberg, etc.), musicien jazz ayant sorti deux albums (il a même déjà joué au festival Coachella, en 2011!), icône culturelle et star d’Internet, citoyen impliqué politiquement et socialement, et humoriste qui s’ignore: Goldblum ne cesse de se réinventer et de nous surprendre. J’en viens à me poser la question: «Coudon’, cet homme a-t-il des défauts?»

En attendant de le voir reprendre son rôle de mathématicien cynique dans Jurassic World: Dominion, le sixième et dernier volet de la franchise dont la sortie a été reportée au 10 juin 2022, je ne bouderai pas mon plaisir. Je planifie déjà l’écoute en rafale de tous les épisodes du World According to Jeff Goldblum. Dans cette série documentaire de la chaîne Disney+, l’acteur s’intéresse à des objets et produits familiers (la crème glacée, la bicyclette, les sneakers, etc.) et nous les fait découvrir autrement. Plaisir délirant en perspective!

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